Interview : Mamadouba Camara, « A Kolenté, nous avons des élus locaux qui ont pris la place de l’administration forestière. Ils hébergent les tronçonneurs, les carbonisateurs et octroient des zones.»
Dans l’arrière-pays, la préservation de l’environnement reste et demeure une grosse équation à laquelle cherchent encore des solutions les services spécialisés presque ’à bout de nerf. Feux de brousse, coupe abusive du bois, carbonisation sont des activités quotidiennes auxquelles se livrent la majeure partie des citoyens à la recherche du gain quotidien. Conséquences, la rareté de la pluviométrie et la perturbation de l’écosystème. Pour en savoir plus sur cette dégradation continue de l’environnement, nous avons rencontré Mamadouba Camara (Léa), chef cantonnement forestier de Kolenté. A lire plutôt !
Fax de Guinée : Mr Mamadouba Camara vous êtes chargé de l’environnement dans la localité de Kolenté depuis une vingtaine d’année. Pouvez-vous nous dire comment se présente la situation dans votre localité ?
Mamadouba Camara : Concernant l’environnement à Kolentin, à l’heure où je vous parle et ça c’est sans vous mentir, c’est pitoyable parce que ça coupe n’importe comment. Les gens sont acharnés pour faire du charbon à fin de subvenir à leurs besoins quotidiens, c’est un grand problème pour le service forestier ici. Et c’est une situation qui nous dépasse, nos agents travaillent sur le terrain, mails il reste encore beaucoup à faire.
Fax de Guinée : Et comme gérez-vous cela sur le terrain ?
Mamadouba Camara : Nous, nous jouons le rôle de conseil forestier auprès des paysans pour qu’il puisse venir près des agents forestiers pour qu’ensemble on se donne des idées et nous les sensibilisons. C’est leur patrimoine, s’ils venaient vers nous pouvons les aider à gérer la situation mais le plus souvent c’est quand nous sortons sur le terrain pour aller les rencontrer, nous trouvons déjà que le gâchis est déjà fait. C’est ça notre problème ici. Ils ne nous écoutent pas. Quelle que soit notre approche, ils se décident eux-mêmes. Et nous avons des élus locaux maintenant qui ont pris la place de l’administration forestière qui hébergent les tronçonneurs, les carbonisateurs, ils les octroient des zones et de l’argent pour travailler avec eux.
Fax de Guinée : Ya-t-il des solutions après tout ?
Mamadouba Camara : Beaucoup de cas rencontrés sont remontés au niveau de la sous-préfecture. Des fois, les autorités locale s’intéressent à trouver solution à certains problèmes, d’autres fois, elles ne réagissent pas. Et ça reste lettre-morte le plus souvent. Et ça affaibli l’agent de terrain s’il n’est pas supporté pas l’autorité par endroit. On ne nous a pas remis de marteau pour aller taper les gens. Nous on les sensibilise à travers des démonstrations pratiques pour qu’ils puissent changer, c’est ça notre rôle.
Fax de Guinée : Parvenez-vous à étudier l’ensemble de la situation. Si on vous demandait d’avancer un chiffre du niveau de destruction de l’environnement dans votre zone, quel chiffre allez-vous donné ?
Mamadouba Camara : Kolentin est divisé en trois zones. Il y a le solima, le saloun et la zone de Gomba. Mais au niveau de ces trois zones, c’est au niveau de Saloun où la carbonisation est très dense. A l’heure où je vous parle, dans la zone de Saloun, si ce n’est les plaines, les cultures de coton c’est très rare. Tout le monde s’intéresse à cette activité de carbonisation. Vers la zone de Solima, c’est pratiqué mais à faible pourcentage. C’est le cas à Kirita et à Gomba.
Fax de Guinée : L’heure est grave Mr Camara. Quelle solution de rechange avez-vous pour sauver la situation ?
Mamadouba Camara : Votre question-là est pertinente parce que moi, je suis un représentant de l’administration forestière au niveau local. Tout ce que je peux faire avec les acteurs, les partenaires paysans, c’est de chercher à les organiser, les sensibiliser, à faire des démonstrations pratiques pour qu’ils puissent faire comme moi dans mes interventions, pour que la pratique de la gestion soit un peu modérer.
Fax de Guinée : A vous entendre, c’est comme si aucune sanction n’est prévue en cas de violation. N’est-ce-pas ?
Mamadouba Camara : Avant dans les années 77, 78 jusqu’en 1980, les carbonisateurs venaient vers les agents des eaux et forêts. Mais à partir de 1986 jusqu’à maintenant, ce sont les agents qui vont vers eux. Ils n’ont plus peur de la loi parce qu’ils sont supportés par les élus locaux.
Fax de Guinée : Pour finir quelles approches prévoyez-vous pour arrêter ou minimiser la pratique ?
Mamadouba Camara : Je suis un missionnaire, je représente un service de l’Etat, mon premier devoir, c’est quand je constate que les gens ne veulent pas changer par rapport aux comportements des élus locaux et des utilisateurs, je fais mon rapport à mon autorité. C’est ce que je peux faire.
Fax de Guinée : Merci Monsieur !
Entretien réalisé par Amadou Keita