Aicha Kokassaly Diabaté : «s’il n y avait pas de baptêmes et de mariages beaucoup d’artistes allaient quitter Conakry »

by Kolazine / il y a 106 mois / 0 Commentaires
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Surnommée par ses fans ‘’ la Kokaline ou la fille à papa’’ Aicha Kokassaly Diabaté est née le 22 octobre 1982 à Conakry. Elle est mariée et mère d’une fille. La Kokaline figure parmi les artistes guinéens les plus convoités de la nouvelle génération dans le milieu culturel. Dans cet entretien, Aicha Kakassaly parle de son parcours artistique, de sa vie et de ses ambitions.
Poduim Magazine : Parle-nous de tes débuts dans la musique…
Aicha Kokassaly Diabaté : je ne suis pas venue dans la musique ; je suis plutôt née dans la musique. Mon père Kokassaly Diabaté et ma mère Saran Diawara étaient tous griots au sein des ballets africains de Guinée. C’est à avec mon père que j’ai commencé la musique. Parfois, quand il quittait la répétition, il m’apprenait à chanter. C’est comme ça que j’ai aussi aimé la musique. A tel enseigne qu’à un moment donné, mes parents ont été obligés de m’envoyée à N’zérekoré pour me permettre de poursuivre les études. Je reconnais que j’étais trop versée dans la musique à l’époque au détriment des études.
A mon retour à Conakry, mon amour pour la musique m’a encore poussé à intégré le groupe de mon frère Djiliba Diabaté. On faisait des animations dans les cérémonies de mariages, de baptêmes et de Sabar. C’est ainsi que j’ai commencé à être connue dans le milieu artistique. Quelques temps après, j’ai créée mon propre groupe qui porte le nom de ‘’héritage Kokassaly’’. J’ai acheté mon orchestre finalement. Et un temps après, j’ai fais un premier album qu’on appelle Batèya. Cela fait huit ans maintenant que je suis avec mon groupe. Nous travaillons sans aucun problème.
Pourquoi tu as aimé la musique parmi tant d’autres métiers ?
Comme je l’ai dit à l’entame de mes propos, je n’ai pas choisi la musique. Je suis née dedans. J’ai le sang de la musique. Mon père et ma mère sont tous des griots. C’est depuis mon grand-père, je suis issue d’une famille griotte. Moi je n’ai pas imité la musique mais, je suis née dedans et j’ai aussi aimé comme métier phare.
Te voila musicienne enfin ! Que retenir encore de ton parcours dans ?
A travers cette profession, je suis connue par bon nombre de Guinéens. Grace à la musique, j’ai eu beaucoup de bonheur. J’ai fait des créations et partout où je vais à travers le pays, je ne suis pas cachée. C’est grâce à ce métier, j’ai fait la connaissance de plusieurs hautes personnalités. Je continue de faire des mariages, des baptêmes et des concerts en fin d’année. Cela fait trois ou quatre ans qu’à la fin de chaque année je fais des concerts. Et je suis heureux de souligner qu’un grand public vient toujours à mes concerts pour me soutenir et apprécier mes prestations. Je dois noter avec bonheur que j’ai pris part à l’ouverture d’un festival d’Aicha Koné au centre culturel franco-guinéen. J’ai aussi joué avec Salifou Keita dans un concert au Palais du Peuple. Récemment, j’ai fait un single avec Aicha Koné pour sensibiliser sur Ebola, qui passe jusqu’à présent sur les chaines de télévisions. J’aime vraiment chanter avec les grandes stars pour me pousser aussi à aller très loin. Car ma vision ne se limite pas seulement à mon niveau actuel, à ma célébrité en Guinée. Je veux partir très loin. Et je vais travailler très fort pour pouvoir représenter la Guinée à travers le monde et apporter des trophées dans mon pays. En Guinée, j’ai travaillé avec Djani Alfa, Djibril Soumah dit Koumi qui m’a aidé dans mon album, le groupe standard de Petit Condé, Saran Diabaté et tant d’autres. Pour le moment, je n’ai aucun problème avec mes amis artistes.
Aicha Kokassaly à des ambitions à court, moyen et long terme ?
Mon ambition première, c’est de devenir grande star. Je veux faire des festivals sur le plan international comme d’autres grandes stars. Car, animer à des mariages et des baptêmes, n’est que élémentaire pour un artiste qui a de l’ambition. Je veux faire le tour de l’Afrique, de l’Europe, d’Amérique et de l’Asie pour vendre l’image de la culture guinéenne. L’argent viendra après mais, pour le moment l’argent n’est pas ma priorité.
Que penses-tu du milieu artistique guinéen ?
La population nous pousse à imiter la culture étrangère, abandonnant progressivement celle de la Guinée. Lorsque vous faites une musique inspirée de nos traditions, la consommation devient difficile, surtout dans les boites de nuit. Si vous empruntez le rythme des autres pour l’accompagnés par une chanson dans nos différentes langues, ça fait danser les gens partout. Je me demande pourquoi ça dans un pays riche en culture comme la Guinée ?
Nous devons faire tout pour tirer nos publics dans cet état de fait et les adaptés à la culture de chez nous. Nous devons nous battre pour imposer nos coutumes et nos cultures pour le progrès culturel du pays. En Guinée, il y a Doumdouba, toumbousèsè, Mamaya et les danses de la forêt qui sont toujours adapté aux rythmes dansable. Nous pouvons les développer et les imposer à travers l’Afrique et dans le monde. Je suis convaincu que la culture guinéenne est très riche et plus variée en Afrique. A travers nos modes vestimentaires, nos chansons et danses, je pense que nous devons servir d’exemples pour les autres. Je demande donc à mes amis de travailler pour la valorisation de la musique guinéenne
Dans les grandes rencontres culturelles, Aicha est trop acclamée par ses fans surtout les grandes dames. Quel est le secret ?
Je n’ai pas de secret. Quand on est artiste, la première des choses, c’est d’être poli, aimé de tout le monde sans aucune distinction d’ethnie, de race ou de religion. Avec les femmes, c’est à la fois intéressant et compliqué. Parce que dans les rencontres, certaines viendront te dire de chanter contre leurs rivales. Mais toi artiste, tu cherches va dans le sens de leur union. A mon sens, l’idéal c’est l’union et la paix entre le public, entre les fans. Ma démarche dans ce cadre contribue à me donner une notoriété auprès des femmes. Moi j’aime tout le monde, pauvre ou riche. Je cherche à satisfaire tout le monde. Certainement, en retour, les femmes m’aiment pour ça.
Tu es aussi confrontée à des difficultés ou contraintes dans l’exercice du métier ?
Oui ! J’ai souvent été confrontée à des difficultés liées au problème de Manager et de producteur. C’est pourquoi mon premier Album est issu d’une autoproduction. Actuellement, mon mari, monsieur Malick Condé est maintenant mon producteur. Et grâce à lui j’évolue et je gagne. Ce problème étant réglé, mes difficultés concernent le moyen de réaliser tout ce que je veux afin de progresser. J’ai beaucoup d’innovations à faire mais les moyens font défaut. Mais je ne désespère pas. Si j’ai une grande structure derrière, je peux faire du jamais réalisées et du jamais vu. Mon deuxième album est en préparation, mais sans soutien je ferai dans l’obligation de m’autoproduire. Et pour faire un seul album aujourd’hui, il faut débourser à la moyenne quarante millions de nos Frans. Pour réaliser un seul clip, il faut là aussi dix millions de francs guinéens. Et si c’est l’artiste qui doit financer tout ça, il ne gagnera rien dans son travail.
Quels sont tes rapports avec les autres artistes guinéens, africains et internationaux ?
J’ai de très bon rapport avec tout le monde. Mon veux, c’est de travailler avec Oumou Sangaré. J’aime sa façon de faire. Sa manière de travailler pour son pays m’inspire à plus d’un titre, je veux faire autant dans mon pays. Nous artistes guinéens avons pour souci de chanter, avoir de l’argent pour le mettre à la banque ou le manger sur le coup. Oumou Sangaré, elle, a des sociétés au Mali et elle est aussi actionnaire dans plusieurs entreprises. Pourquoi les guinéens ne peuvent pas faire comme elle ? Pour le moment, je collabore avec Kaniba Oulen. Elle est souvent entre la Guinée et le Mali et nos relations sont très bonnes.
Tu as donc d’autres ambitions à part la musique ?
Bien sûr ! J’ai l’ambition de créer une société pour venir en aide aux jeunes filles qui n’ont pas eu la chance de fréquenter l’école ou poursuivre les études. Tout le monde ne peut pas étudier. Je veux trouver aussi du travail pour mes frères qui n’en ont pas et qui sont dans les quartiers. Quand j’aurai les moyens de faire ça, beaucoup de nos frères et sœurs trouveront du travail. J’ai beaucoup d’autres projets au-delà de la musique.
Quel est ton message pour tes frères et sœurs artistes et pour les autorités du pays ?
Je demande aux artistes d’être courtois. Un artiste est comme une fille qui a quitté sa famille pour son foyer. Tout comportement qu’ils font montre, en bien ou en mal, est placé au compte de leur éducation famille. Nous sommes tous guinéens. Nous devons prôner la paix, l’amour et l’union. Nous devons être solidaires. Nous devons aimer le bonheur d’autrui et partager les peines. Nous devons considérer nos fans sans discrimination. L’orgueil ne nous conduit nulle part. Il n’est pas bon de faire des diffamations entre nous. Les artistes forment une grande famille et s’il y a un problème, nous pouvons laver le linge sale en famille. Si un artiste fait un album et qu’il y ait des manquements, au lieu de critiquer dans les quartiers, on doit appeler la personne pour lui signifier cela. Là, il ne répétera pas la même erreur. C’est pourquoi d’ailleur il est normalement conseiller à un artiste avant la sortie de son album, de le faire écouter par cinq vieux artistes pour des critiques et suggestions. Nous qui sommes de la nouvelle génération, nous devons suivre et écouter les anciens. Il ne faudrait pas que les gens fassent du plagiat. Nous devons aussi créer. La Guinée à plusieurs rythmes que nous pouvons exploiter.
Aux autorités, je leur demande d’aider les artistes. En Guinée, les artistes souffrent. Nos droits d’auteurs au niveau du BGDA ne sont pas réglés. Cette affaire à commencer depuis le temps de nos pères et jusqu’à maintenant le problème est là. Les artistes souffrent pour avoir des droits d’auteurs. Certains artistes prennent 2500 et d’autres jusqu’à 1000 francs guinéens. Elles doivent donner les droits d’auteurs aux artistes pour qu’ils puissent travailler. Les dirigeants doivent aussi nous aider à chercher des festivals ou autres choses qui peuvent apporter de l’argent et du succès au pays. Avant, les ballets africains ne faisaient pas un mois en Guinée sans faire des tournées. Moi je suis née au moment où mon père était en tournée. Je vous précise d’ailleurs, que mon père a fait sept fois le tour du monde avec les ballets africains et lui seul jouait sept rôles dans ce groupe. L’état peut continuer sur cette même lancée pour la jeune génération. Il doit créer des bonnes conditions pour les artistes. Les artistes souffrent en Guinée. Je me dis que s’il n y avait pas de baptêmes et de mariages beaucoup d’artistes allaient quitter Conakry pour partir cultiver au village.

Entretien réalisé par Daouda Yansané

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